D’autres se sont livrés, au cours des siècles, à ce type d’exercices, repris aujourd’hui avec un bel aplomb par François Furet. 60 citations de Karl Marx - Ses plus belles pensées Citations de Karl Marx Sélection de 60 citations et phrases de Karl Marx - Découvrez un proverbe, une phrase, une parole, une pensée, une formule, un dicton ou une citation de Karl Marx issus de romans, d'extraits courts de … MARX, FREUD ET LA REVOLUTION fOÔlALE 19. Comme l’on sait, cette idée esquissée en 1852 sera développée en 1871 dans ses écrits sur la Commune – premier exemple de révolution prolétarienne qui brise l’appareil d’État et en fini avec ce « boa constrictor » qui « enserre le corps social dans les mailles universelles de sa bureaucratie, de sa police, de son armée permanente ». En revanche, on peut repérer la présence d’un élément jacobin chez un marxiste aussi subtile et novateur qu’Antonio Gramsci. Le prolétariat désigne, dans la doctrine marxiste, la classe sociale des travailleurs qui ne possèdent pour vivre que leur force de travail. L’homme y est dépossédé de son travail, de son essence. -Dans le contexte des articles de 1843-1844, elle suggère une tendance de la révolution politique (dans sa forme jacobine) à devenir une fin en soi et à entrer en conflit avec la société civile/bourgeoise. Mais elles dévoilèrent l'abîme que recouvrait cette écorce, sous laquelle bouillonnait un océan sans fin capable, une fois déchaîné, d'emporter des continents entiers. D’autant plus qu’une des exigences du matérialisme historique est d’expliquer les idéologies et les illusions par la position et les intérêts des classes sociales… Or, il n’y a pas chez Marx (ou Engels) une tentative, même approximative, de définir la nature de classe du jacobinisme. Le responsable de cet « échec » serait, en dernière analyse… Jean-Jacques Rousseau. La révolution vise à instaurer une nouvelle société. [19] Cf. Quelles sont les esprits du passé (Marx) qui méritent d’être évoqués deux cent ans après ? Dans un passage très connu de La Sainte-Famille, il passe rapidement en revue les principaux représentants de cette tendance : « Le mouvement révolutionnaire qui commença en 1789 au cercle social, qui, au milieu de sa carrière, eut pour représentants principaux Leclerc et Roux et finit par succomber provisoirement avec la conspiration de Babeuf, avait fait germer l’idée communiste que l’ami de Babeuf, Buonarroti réintroduisit en France après la révolution de 1830. ), et de situer le tout dans le cadre de l’histoire mondiale, grâce à sa méthode historique matérialiste. Marx est athée et s’en revendique, sans faire de l'athéisme une nouvelle « religion ». Comme nous l’avons vu, Marx pensait que le prolétariat socialiste devait se débarrasser du passé révolutionnaire du XVIIIe siècle. La comparaison que Marx esquisse un an plus tard (La Sainte-Famille) entre Robespierre et Napoléon, ce dernier étant censé « accomplir la Terreur en remplaçant la révolution permanente par la guerre permanente », illustre bien la distance entre cette formule et l’idée d’un germe de révolution prolétarienne. La publication en cours (en Pléiade) des écrits politiques de Marx atteste par ailleurs l’importance de son apport concernant la politique en actes et ses formes critiques : les guerres et les révolutions. Les principales forces de ce mouvement – les bras-nus, les femmes républicaines, les Enragés, les Egaux et leurs porte-paroles (Jacques Roux, Leclerc, etc.) Raisonnement qui le conduit à la célèbre conclusion formulée dans Le Dix-Huit Brumaire : « La révolution sociale du XIXe siècle ne peut pas tirer sa poésie du passé, mais seulement de l’avenir. [18] Daniel Guérin, « La lutte de classes sous la Première République », Gallimard, 1946, p. 12. Dans ce sens aussi elle est porteuse d’un avenir qui reste ouvert et inachevé. Daniel Guérin interprète cette formule comme allant dans le sens de sa propre interprétation de la Révolution française : « Marx employa l’expression de révolution permanente à propos de la Révolution française. C’est une affirmation bien discutable – la Commune de 1793 a inspirée celle de 1871 et celle-ci, à son tour, a nourri Octobre 1917 -, mais elle témoigne de l’hostilité de Marx a toute résurgence du jacobinisme dans le mouvement prolétarien. Gerald Bevan, Penguin UK (2008), Author’s Foreword : 1850s and later Variante: We can state with conviction, therefore, that a man's support for absolute government is in direct proportion to the contempt he feels for his country. La meilleure preuve en est les tentatives répétées et insistantes de mettre fin, une bonne fois pour toutes, officiellement et définitivement, à la Révolution française. « Les communistes, clament Marx et Engels, peuvent résumer leur théorie dans cette proposition unique : abolition de la propriété privée » (Manifeste du Parti communiste). Quelles sont donc ces « données concrètes » infiniment plus importantes que les rapports de production et la lutte de classes ? Cet ensemble est loin d’être homogène : il témoigne de changements, réorientations, hésitations et parfois contradictions dans sa lecture des événements. Lorsque éclate le soulèvement pour l'unité nationale et le gouvernement démocratique, Marx rédige les Revendica c) La Terreur a été une méthode plébéienne d’en finir de façon radicale avec les vestiges féodaux et dans ce sens elle a été fonctionnelle pour l’avènement de la société bourgeoise. « Les principes de la Commune, affirme Marx, sont éternels et ne peuvent être détruits : ils seront toujours posés à nouveau à l’ordre du jour, aussi longtemps que la classe ouvrière n’aura pas conquis sa libération » (Discours sur la Commune). Le projet de livre sur la Convention n’a pas abouti mais on trouve, parsemées dans ses écrits tout au long de sa vie, de multiples remarques, analyses, excursions historiographiques et esquisses interprétatives sur la Révolution française. Marx affirme que la société doit présenter, dans sa structure, des facteurs qui y soient favorables. Ensuite, il est plus fondamentalement nécessaire que s’exacerbe l’antagonisme entre les forces productives et les rapports de production, grâce auquel la classe révolutionnaire peut prendre conscience de ses intérêts et de ses objectifs. p. 83 : « Mais pour affirmer l’universalité abstraite de la liberté, la Révolution a dû procéder par une scission entre société civile et Etat, en déduire, pour ainsi dire, le politique du social. Nous en reparlerons plus loin. Pour Marx, la religion est une structure créée par la société de classes, et qui évolue selon ses besoins. aussi l’article contre Karl Heinzen de 1847 : « En assénant ces violents coups de masse, la Terreur ne devait donc servir en France qu’à faire disparaître du territoire français, comme par enchantement, les ruines féodales. Comme le souligne avec une force visionnaire Ernest Bloch, « liberté, égalité, fraternité font aussi partie des engagements qui ne furent pas honorés, ils ne sont donc pas encore réglés, éteints ». LE BILAN D’UNE REVOLUTION. Marx affirme en effet que l’histoire est travaillée par le conflit fondamental entre le mode de production et les rapports de production : « homme libre et esclave, patricien et plébéien, baron et serf, maître de jurandes et compagnon, bref oppresseurs et opprimés, en opposition constante, ont mené une lutte ininterrompue » (Manifeste du parti communiste). En d’autres termes : l’appareil étatique sert les intérêts de classe de la bourgeoisie sans être nécessairement sous son contrôle direct. [26] K. Marx, « Contribution à la Critique de la Philosophie du Droit de Hegel », 1944, cité dans NRF, p. 151-153. [2] K. Marx, « Die Heilige Familie », 1845, Berlin, Dietz Verlag, 1953, p. 196. Si la coopération est aliénante dans sa forme capitaliste, dans la mesure où elle génère le surtravail extorqué aux travailleurs, elle ne l’est plus dans sa forme communiste, car ses gestionnaires ne représentent plus le capital et ses fruits reviennent entièrement aux travailleurs. La formule est discutable. Mais on peut en dégager aussi quelques lignes de force qui permettent de définir l’essence du phénomène – et qui vont inspirer au cours d’un siècle et demi toute l’historiographie socialiste. Tu prépares des épreuves de dissertation ? Le « locus classicus »de cette hypothèse est un passage de La Question Juive (1844) : « Évidement à des époques où l’Etat politique comme tel naît violemment de la société bourgeoise (…) l’Etat peut et doit aller jusqu’à la suppression de la religion (…) mais uniquement comme il va jusqu’à la suppression de la propriété privée, au maximum, à la confiscation, à l’impôt progressif, à la suppression de la vie, à la guillotine. Dans ce sens, elle a été un pas gigantesque dans ce que Ernst Bloch appelle la « marche debout de l’Humanité » – un processus historique qui est encore loin d’être achevé… Bien sûr, on en trouve des précédents dans les mouvements antérieurs (la Guerre des Paysans du XVIe siècle, la Révolution anglaise du XVIIe siècle), mais aucun n’atteint la clarté, la force politique et morale, la vocation universelle et hardiesse spirituelle de la révolution de 1789-1974 – jusqu’à cette époque, la plus colossale (Marx) de toutes. Dès lors, « la vie réelle de l’État, même non pénétré des exigences socialistes, renferme dans ses formes modernes les exigences de la raison ». Cette impression est confirmée par des textes quelque peu antérieurs à 1848, où le rôle de la bourgeoisie française apparaît bien moins héroïque. En lisant ces textes, on a parfois l’impression que Marx n’exalte autant la bourgeoisie révolutionnaire de 1789 que pour mieux stigmatiser sa « misérable » contrefaçon allemande de 1848. [11] K. Marx, « L’Idéologie allemande », cité dans NRF p. 184 et 181. Cet exemple historique enseigne tout particulièrement les nécessités de subvertir la république démocratique, de briser la machine d’État (armée, police, bureaucratie, justice, etc. »[9]. Cette célébration des vertus révolutionnaires de la bourgeoisie française va inspirer plus tard (surtout au XXe siècle) toute une vision linéaire et mécanique du progrès historique chez certains courants marxistes. La Révolution française, par son caractère bourgeois, ne pouvait pas émanciper la société de cette « excroissance parasitaire », de ce « grouillement de vermine d’État », de cette« énorme parasite gouvernemental »[4]. Engels « Der Magyarische Kampf », Marx-Engels Werke, Dietz Verlag, Berlin 1961, Tome 6, p. 166. Il consacra plus de 20 ans de sa vie à l'écriture de cette oeuvre, mais n'en a achevé qu'une partie: le premier livre, publié en 1867. Avant de définir le prolétariat et son importance chez Karl Marx, voyons comment cette classe apparaît dans lhistoire selon le philosophe allemand. Il en résulte une vision d’ensemble, vaste et cohérente, du paysage révolutionnaire français, qui fait ressortir la logique profonde des événements au-delà des multiples détails des épisodes héroïques ou crapuleux, des reculs et des avancées. [13] K. Marx, « La Question Juive », 1844, Oeuvres Philosophiques, Costes, 1934, p. 180-181. Bertolt Brecht est un auteur dramatique allemand, né le 10 février 1898 à Augsbourg (Bavière) et mort le 14 août 1956 à Berlin-Est. >> Le communisme selon Marx sur un post-it. La société bourgeoise, dans sa sobre réalité, s’était créée ses véritables interprètes et porte-parole dans la personne des Say, des Cousin, des Royer-Collard, des Benjamin Constant et des Guizot. Ces remarques ne visent pas à critiquer Daniel Guérin mais au contraire à mettre en relief la profonde originalité de sa démarche : il n’a pas simplement développé des indications déjà présentes chez Marx et Engels, mais a formulé, en utilisant la méthode marxiste, une interprétation nouvelle, qui met en évidence la dynamique « permanentiste » du mouvement révolutionnaire des bras-nus en 1793-1794. Robespierre et Napoléon, même combat ? (…) Les révolutions antérieures avaient besoin de réminiscences historiques pour se dissimuler à elles-mêmes leur propre contenu. Chez le vieux Engels (en 1889), on trouve quelques références rapides au conflit entre la Commune (Hébert, Chaumette) et le Comité de Salut Public (Robespierre), mais il n’est pas question du courant enragé représenté par Jacques Roux.[21]. La Révolution française a fait germer les idées d’un « nouvel état du monde », les idées communistes (le « cercle social », Babeuf, Sylvain Maréchal, François Bossel, etc.) Cette hésitation est visible dans les variations d’une période à l’autre, d’un texte à l’autre, et parfois à l’intérieur d’un même document… Toutes les hypothèses qu’il avance ne sont pas du même intérêt. En revanche, l’idée de révolution permanente au sens fort – celui du marxisme révolutionnaire du XXe siècle – apparaît chez Marx pour la première fois en 1844, à propos de l’Allemagne. Comme il le souligne dans un passage brillant et ironique de La Sainte-Famille (1845), qui saisit en un trait de plume le fil rouge de l’histoire : « la puissance de cet intérêt fut telle qu’il vainquit la plume d’un Marat, la guillotine des hommes de la Terreur, le glaive de Napoléon, tout comme le crucifix et le sang-bleu des Bourbons »[2]. 3. See more ideas about quotes, revolution quotes, words. Révolution et démocratie chez Marx et Engels La bibliothèque d'ActuaLitté. >> Les élites selon Pareto sur un post-it. D’abord, le prolétaire est exploité par le patron qui possède les machines. Cette définition part, on le sait, d’une analyse critique des résultats du processus révolutionnaire : de ce point de vue, il s’agit pour Marx, sans l’ombre d’un doute, d’une révolution bourgeoise. Dossier : Ernest Mandel, l’héritage immense d’un marxisme vivant, L’instant de vérité pour le mouvement indépendantiste catalan, Retour sur « Penser l’émancipation ». Dans ses articles écrits pendant la révolution de 1848, il ne cesse de dénoncer la « lâcheté » et la « trahison » de la bourgeoisie allemande, en la comparant au glorieux paradigme français : « La bourgeoisie prussienne n’était pas la bourgeoisie française de 1789, la classe qui, face aux représentants de l’ancienne société, de la royauté et de la noblesse, incarnait à elle seule toute la société moderne. [17], Mais ils ’agit à nouveau d’une remarque « en passant », où les Jacobins ne sont même pas explicitement désignés. [1] K. Marx, « Die Deutsche Ideologie », 1846, Berlin, Dietz Verlag, 1960, p. 92. Tu prépares des épreuves de dissertation ? A peine la classe moyenne ose-t-elle concevoir, de son point de vue, la pensée de son émancipation, que déjà l’évolution des conditions sociales et le progrès de la théorie politique déclare ce point de vue périmé, ou du moins problématique ». Ce ne sont pas des analyses de classe qui manquent dans ses écrits sur la Révolution française : le rôle de l’aristocratie, du clergé, de la bourgeoisie, des paysans, de la plèbe urbaine et même du « prolétariat » (concept un peu anachronique dans la France du XVIIIe siècle) sont passés en revue. Elle savait que la base de sa domination était la déconstruction de la féodalité à la campagne, la création d’une classe paysanne libre, possédant des terres. En effet, le philosophe a également imaginé, comme dans certaines utopies socialistes, une révolution économique fondée sur l’association des producteurs. Or, dans cet article, Engels mentionne comme exemple contemporain de cette « révolution permanente » le soulèvement national/populaire hongrois de 1848 dirigé par Lajos Kossuth, « qui était pour sa nation Danton et Carnot en une seule personne ». Cette lecture hégélienne des événements conduit Furet à la curieuse conclusion que la Révolution française a abouti à un« échec », dont il faudrait chercher la cause dans une « erreur » : vouloir « déduire le politique du social ». La révolution contre la société féodale, indique Marx, a constitué l’État politique moderne en affaire générale, c’est-à-dire en État réel. La critique sociale, qui constitue la substance de l’œuvre de Karl Marx, a, pour l’essentiel, deux cibles : l’Etat et l’Argent. Leur réalisation effective exige l’abolition de l’ordre bourgeois. Une des caractéristiques principales qui distingueront cette nouvelle révolution de la Révolution française de 1789-1794 sera, selon Marx, son « antiétatisme », sa rupture avec l’appareil bureaucratique aliéné de l’État. Outre ce recueil préparé pour les Editions Sociales par Claude Mainfroy, il en existe un autre, contenant uniquement les écrits de Marx (avec une longue introduction de F. Furet) rassemblés par Lucien Calviez : « Marx et la Révolution française » (MRF), Flammarion, 1986. Il est vrai qu’il « n’avait rien d’un terroriste exalté » ; néanmoins, « il considérait encore l’Etat comme une fin en soi, et la vie civile uniquement comme son trésorier et comme son subalterne, qui devait renoncer à toute volonté propre. qui sont déjà menacées par le prolétariat) ne pourront pas avoir une pratique révolutionnaire conséquente. On retrouve cette thèse dans Le Dix-Huit Brumaire (1852), mais cette fois Marx insiste sur la ruse de la raison qui fait des Jacobins (et de Bonaparte) les accoucheurs de cette même société bourgeoise qu’ils méprisaient : « Camille Desmoulin, Danton, Robespierre, Saint-Just, Napoléon, les héros, de même que les partis et la masse lors de l’ancienne Révolution française accomplirent dans le costume romain, et avec la phraséologie romaine, la tâche de leur époque, à savoir la libération et l’instauration de la société bourgeoise moderne. [4] K. Marx, « Le Dix-Huit Brumaire », cité dans SRF, p. 148 ; – Id., « La Guerre Civile en France » (premier et second essai de rédaction), cité dans SRF, p. 187-192. Présentant cette analyse dans Le Dix-Huit Brumaire, il observe – de façon analogue à Tocqueville – que la Révolution française n’a fait que. Marx et la Révolution française : la « poésie du passé », A lire : un extrait de la préface de Sophie Wahnich à « Octobre 17. C’est une interprétation possible des contradictions de la Révolution française, mais est-elle vraiment « infiniment plus concrète » que celle esquissée par Marx ?[5]. Pris dans une contradiction insoluble, ils ont voulu sacrifier la société bourgeoise « à un mode antique de vie politique ». On retrouve aussi l’aspect de la confrontation avec la société civile/bourgeoise mais contrairement au modèle jacobin de 1793, celle-ci n’est plus l’œuvre terroriste (nécessairement vouée à l’échec) de la sphère politique en tant que telle – qui essaie en vain de s’attaquer à la propriété privée par la guillotine – mais bien de l’intérieur de la société civile elle-même, sous la forme de révolution sociale (prolétarienne). Elle ne peut pas commencer avec elle même avant d’avoir liquidé complètement toute superstition à l’égard du passé ».[19]. La révolution est un phénomène récurrent. Mais on peut en dégager aussi quelques lignes de force qui permettent de définir l’essence du phénomène – et qui vont i… Cette idée, développée dans La Sainte Famille, implique comme l’hypothèse antérieure, une période historique d’exaspération et d’autonomisation du politique. D’autre part, la phrase, dans le« Manifeste Communiste », qui décrit « les premières tentatives du prolétariat pour imposer directement son propre intérêt de classe » – tentatives qui ont eu lieu « dans la période du bouleversement de la société féodale -, se réfère elle aussi à Babeuf[22] (explicitement mentionné dans ce contexte). Les idéaux de la Révolution française – Liberté, Egalité, Fraternité, les Droits de l’Homme (notamment dans leur version de 1793), la souveraineté du Peuple – contiennent un « surplus utopique »(Ernest Bloch) qui déborde l’usage qu’en a fait la bourgeoisie. Napoléon a été le premier à décréter, le Dix-Huit Brumaire, que la révolution était finie. (…) La vie politique cherche à étouffer ses conditions primordiales, la société bourgeoise et ses éléments pour s’ériger en vie générique véritable et absolue de l’homme. »[10], Si l’analyse marxienne du caractère bourgeois de la Révolution est d’une remarquable cohérence et clarté, la même chose ne peut être dite pour ses tentatives d’interpréter le jacobinisme, la Terreur, 1793. « le prolétaire est déjà engagé dans le combat contre le bourgeois. Si dans les œuvres sur la révolution de 1848-1852 Marx n’hésite pas à qualifier les héritiers modernes de la Montagne comme« démocrates petits-bourgeois », il est très rare qu’il étende cette définition sociale aux Jacobins de 1793. J’utilise tantôt l’un, tantôt l’autre, et parfois l’original allemand (notamment pour les textes qui ne figurent dans aucun des recueils). Lénine et les bolcheviques qui n’avaient pas, eux, des illusions sur la bourgeoisie libérale russe, mais qui avaient pris surtout avant 1905, le jacobinisme comme modèle politique. [12] K. Marx, « La critique moralisante et la morale critique (contre Karl Heinzen) », SRF p. 90. Sa propre pensée en est un excellent exemple : l’idée même de révolution dans ses écrits (et ceux d’Engels), comme mouvement insurrectionnel des classes dominées qui renverse un Etat oppresseur et un ordre social injuste, a été dans une très large mesure inspirée par cette tradition… D’une façon plus générale, la grande Révolution française fait partie de la mémoire collective du peuple travailleur – en France, en Europe et dans le monde entier – et constitue une des sources vitales de la pensée socialiste, dans toutes ses variantes (communisme et anarchisme y compris). Elle était déchue au rang d’une sorte de caste (…) encline dès l’abord à trahir le peuple et à tenter des compromis avec le représentant couronné de l’ancienne société ».[7]. Analysant le comportement des couches populaires urbaines (« le prolétariat et les autres catégories sociales n’appartenant pas à la bourgeoisie »), Marx affirme : « Même là où elles s’opposaient à la bourgeoisie, comme par exemple de 1793 à 1794 en France, elle ne luttaient que pour faire triompher les intérêts de la bourgeoisie, quand bien même ce n’était pas à sa manière. Confronté au mystère jacobin, Marx hésite. L’erreur de Rousseau et de la Révolution française tient dans la tentative d’affirmer « l’antécédence du social sur l’État ». 2- La révolution prolétarienne. « toute les révolutions ont perfectionné cette machine au lieu de la briser. Chez Marx, en tout cas, elle montre le refus de toute filiation directe entre jacobinisme et socialisme. Cette organisation sera proprement communiste en tant qu’elle reposera sur l’abolition de la propriété privée et la mise en commun des moyens de production. Le point de départ de Marx, c’était donc la lutte des classes des ouvriers contre les bourgeois. [14] K. Marx, « La Sainte-Famille », 1845, cité dans NRF p. 170-171. Ramassant en un paragraphe la signification historique des révolutions de 1848 et de 1789 (mais ses remarques sont plus pertinentes pour la dernière que pour la première), Marx observe, dans un article de la Nouvelle Gazette Rhénane en 1848 : « Elles étaient le triomphe de la bourgeoisie, mais le triomphe de la bourgeoisie était alors le triomphe d’un nouveau système social, la victoire de la propriété bourgeoise sur la propriété féodale, du sentiment national sur le provincialisme, de la concurrence sur le corporatisme, du partage sur le majorat, (…) des lumières sur la superstition, de la famille sur le nom, de l’industrie sur la paresse héroïque, du droit bourgeois sur les privilèges moyenâgeux. Il garde quelque chose d’inachevé… Il contient une promesse non encore accomplie. Cette expression apparaît d’ailleurs dans un des livres allemands sur la révolution que Marx avait lu en 1843-1844.[25]. Jusqu’ici. Cf. Les partis qui luttèrent à tour de rôle pour le pouvoir considèrent la conquête de cette immense édifice D’État comme la principale proie du vainqueur ». Une vision critique et démystificatrice qui dévoile, derrière la fumée des batailles et l’ivresse des discours, la victoire d’un intérêt de classe, l’intérêt de la bourgeoisie. Expulsé de Bruxelles en mars 1848, Marx est au même moment invité à rentrer en France par le gouvernement provisoire issu de la révolution de Février à l'instigation de ses membres ouvriers.